La transformation digitale par absorption : le cas Walmart

En 2016, Walmart, la multinationale américaine spécialisée dans la distribution, rachetait Jet.com pour opérer sa transformation numérique. Trois ans après, tous les voyants sont au vert, constate Yves Pizay, consultant chez Kea & Partners.

Annoncé le 26 février dernier, le rachat d’Aspectiva, une start-upisraélienne spécialisée dans la recommandation de produits, nous replonge trois ans en arrière. Le 8 août 2016, Walmart fait l’acquisition de Jet.com pour 3,3 milliards de dollars.

Ce montant record suscite l’étonnement de la presse financière américaine. En effet, Jet.com ne sera pas rentable avant 2020, selon les prévisions de Marc Lore, son PDG. La start-up a levé 565 millions de dollars en quatre cycles de financement et elle dépense sans compter pour attirer de nouveaux clients : son budget publicitaire, par exemple, oscille entre 20 et 25 millions de dollars par mois. On se demande à l’époque si cette opération ne sera pas un coup d’épée dans l’eau dans le combat contre les géants du web.

Nouvelle stratégie

Pour mémoire, à l’été 2016, la situation de Walmart est alarmante sur le plan numérique. Les ventes en ligne du distributeur américain sont inférieures à 14 milliards de dollars au premier semestre 2016 (contre 107 milliards pour Amazon). Plus inquiétant : cette atonie se prolonge en dépit d’efforts répétés pour inverser la tendance. Le Walmart Labs, filiale de Walmart dédiée à l’innovation existe depuis avril 2011, mais les résultats ne sont pas à la hauteur des moyens investis.

Le choix de Jet.com s’impose donc, et ce pour deux raisons. Tout d’abord, un modèle économique centré sur le client et fondé sur une technologie de prix innovante. La « smart card » est un procédé de tarification dynamique qui offre au consommateur la possibilité de réduire le prix de sa commande actionnant plusieurs leviers cumulatifs : des prix qui baissent pendant que vous faites vos courses, achat en quantité d’un même produit, non-souscription d’options de livraison, et enfin, le droit de retour.

Retour d’expérience gagnant

Trois ans plus tard, Walmart bénéficie aujourd’hui des premiers effets de synergie convergeant vers un renforcement de sa culture client ! En témoigne, l’ouverture dès l’été 2018 à New York, d’une plate-forme logistique dédiée à la préparation des commandes passées sur Jet.com et sur Walmart.com.

Les deux principaux objectifs de cet entrepôt : d’une part, booster les ventes de Jet.com, qui cible spécifiquement les Millenials branchés classe supérieure new yorkais ; d’autre part, renforcer la présence physique de Walmart dans la région, pour sécuriser la qualité du service de livraison à domicile, avec pour ambition de généraliser, à terme, la livraison à domicile le jour même.

Côté chiffres, l’accélération de la croissance des ventes en ligne de Walmart depuis l’été 2016 traduit indéniablement un effet Jet.com. Au printemps 2018, la croissance du e-commerce est d’environ de 33 %. Et cela semble désormais être le rythme de croisière de Walmart qui projette «une croissance de ses ventes en ligne d’environ 40% sur l’année fiscale 2019».

Une forte croissance

La transformation phygitale en cours a surtout des effets positifs sur l’ensemble du groupe, qui annonçait dès le deuxième trimestre 2017 une croissance de 3,8 % de son chiffre d’affaires, soit la plus forte jamais enregistrée depuis 10 ans. Trois ans après le rachat de Jet.com, tous les voyants sont donc au vert pour Walmart.

Un Walmart aujourd’hui à la page de ce que Jack Ma, le président d’Alibaba, appelle le nouveau retail : « cette intégration de l’online, de l’offline, de la logistique et de la donnée à travers une chaîne de valeur unique ». Une stratégie payante donc…

Tribune parue le 20 mars 2019 sur LesEchos.fr

A l’heure où la loi Pacte pose un cadre à la raison d’être et à la mission des entreprises, Arnaud Gangloff, Président de Kea, fait partie des 8 dirigeants engagés à dévoiler le dessous d’une transformation en responsabilité pour Nuova Vista. Avec une conviction : non, l’entreprise à mission n’est pas une utopie !

Sans naïveté ni présomption, nous sommes convaincus chez Kea & Partners qu’une telle transformation en responsabilité est l’occasion de construire des modèles économiques mieux ancrés dans notre siècle, distincts du modèle ultra-libéral et des formes de capitalisme autoritaire qui émergent dans certaines régions du monde.

« Au-delà de chaque citoyen, de l’État, des ONG, acteurs de la Société civile et instituts de recherche, l’entreprise a un rôle à jouer pour que la Société dans son ensemble soit soutenable demain. En tant que consultants en stratégie, nous avons un rôle clé à jouer : inciter, porter la voix, influencer nos clients au mieux de leurs responsabilités sociales et environnementales ».

Arnaud Gangloff

Retrouvez également les témoignages de :

  • Pascal Demurger, Directeur général, MAIF
  • Guillaume Desnoës, Dirigeant fondateur, ALENVI
  • Olivier Grabette, Directeur général adjoint, RTE & Nathalie Devulder, Directrice du développement durable
  • Philippe-Loïc Jacob, Président, CITEO
  • Emery Jacquillat, Président directeur général, CAMIF-MATELSOM
  • Isabelle Lescanne, Directrice générale déléguée, ONYX DEVELOPPEMENT – GROUPE NUTRISET
  • Anne Mollet, Directrice générale déléguée, PERL – GROUPE NEXITY

Envie d’approfondir le sujet ?

La loi PACTE, adoptée en avril 2019, a posé un cadre à la raison d’être et à la mission des entreprises, initiant en France un mouvement en plein essor. Prendre en compte les externalités, faciliter le dialogue social, définir le rôle de l’entreprise dans la société… autant d’enjeux auxquels les dirigeants sont confrontés.

Ils étaient d’ailleurs plus de cinq-cents chefs d’entreprise, cadres et entrepreneurs rassemblés à Lyon les 15 et 16 novembre 2019 lors des Entretiens de Valpré sur ce thème de la responsabilité. Que signifie cet embrasement collectif et que nous révèle-t-il des enjeux économiques actuels ? Que faut-il entendre par responsabilité ? Comment la mettre en œuvre au sein de l’entreprise et par où commencer ? Qu’est-ce qu’un leader responsable ?

De l’enquête effectuée par Kea & Partners visant à mesurer les nouveaux champs de la responsabilité en préambule des entretiens de Valpré, il ressort trois principes directeurs à l’attention des chefs d’entreprise.

Cohérence du modèle. Pour 75% des répondants, la responsabilité de l’entreprise est à la fois une affaire de résultats et de moyens, le chemin étant aussi important que la cible !. Cela signifie que les dirigeants ne peuvent exiger une transformation « à marche forcée », mais qu’ils doivent composer avec le temps long, la sensibilité des équipes, la complexité du terrain. Cela signifie aussi que les objectifs en matière de responsabilité doivent s’incarner concrètement dans les composantes de l’entreprise : adhésion des actionnaires, création d’un système de production et de distribution efficient et circulaire, consultation des parties prenantes dans l’exercice stratégique, représentativité des salariés, etc.

Exemplarité du dirigeant

Loin de l’héroïsme des chefs de guerre ou de la rigueur des contremaîtres, c’est avant tout le souci du bien commun qui est attendu (33%) : il privilégie les trajectoires communes aux trajectoires individuelles, fait grandir ses salariés, recherche l’harmonie… Il se doit ensuite d’être exemplaire (31%) : il inspire par ses actes qu’il met en cohérence avec ses valeurs et sait se remettre en question. Enfin, il est à l’écoute et ouvert (18%) et prend en considération le projet de chacun. 6 dirigeants sur 10 estiment mettre en pratique ces qualités de façon régulière, voire systématique, dans le cadre de leurs fonctions, et près de 75% voient déjà leur rôle évoluer sous l’effet de la montée en puissance des enjeux de responsabilité au sein de l’entreprise. Même, 73% déclarent devoir intégrer la dimension responsable dans leurs décisions et projets, bien que peu d’entre eux aient à rendre des comptes en la matière : seuls 26% des PDG et 17% des managers ont des objectifs chiffrés.

Responsabilisation des équipes

Les collaborateurs sont les tout premiers accélérateurs de la responsabilité de l’entreprise. Ils sont cités par 67% des répondants, devant les dirigeants eux-mêmes (66%), la société civile (54%) et les clients (53%). Loin derrière, l’État n’est considéré comme un levier de changement que pour 20%. Les marchés financiers sont quant à eux considérés comme les principaux freins à la mise en place d’une politique RSE (45%). Pour les chefs d’entreprise, l’enjeu consiste donc à offrir des marges de manœuvre suffisantes pour que chacun, à son niveau, dans la mesure de son travail, fasse croître l’entreprise en responsabilité.

Par ailleurs, l’exercice des responsabilités est encore associé de façon trop importante au pouvoir. D’une manière générale, les dirigeants et managers interrogés associent fortement la notion de responsabilité au pouvoir (32%), à la portée de leur action personnelle, au fait d’assumer les conséquences de leurs actes, mais également à l’impératif de construire un collectif fort en considérant l’ensemble des parties-prenantes de l’organisation (28%). A contrario, ils associent moins l’exercice des responsabilités à l’arbitrage entre le temps court et le temps long (20%) et à la bonne gestion des équilibres face aux tensions qui peuvent se créer dans l’entreprise (19%) alors que ce sont des enjeux clés face au rythme et à la complexité croissante des transformations auxquelles ils font face.

« Aujourd’hui, la plupart des dirigeants et managers ayant répondu à notre enquête se situent dans la moyenne de leur secteur en matière de RSE et ils perçoivent celle-ci encore trop comme une contrainte, de mise en conformité notamment. Trop peu la considèrent comme un moyen de se singulariser, comme un levier d’innovation et de création de valeur. Or, c’est à cette condition que l’entreprise pourra pleinement embrasser ses enjeux de responsabilité et accélérer dans ce domaine »

GAFA et autres BATX, les acteurs de l’économie du partage font désormais partie intégrante de l’économie structurée : 9 des 10 plus grosses capitalisations boursières aujourd’hui sont des entreprises plateformes, obligeant les acteurs traditionnels à se réinventer.

Mais que sont réellement les plateformes ? Quel business-model se cache derrière ces success-stories ? Par ailleurs, devons-nous nous questionner sur le dessein philosophique et politique – le projet pour l’Homme – que sous-tend un tel développement ?

En contribuant au cercle de réflexion du think & do tank Entreprise & Progrès sur le modèle des plateformes, Kea & Partners pose plus largement la question de l’avenir de nos entreprises et de leurs relais de croissance et d’innovation. Avec quel poids économique demain, de l’Europe notamment ? Avec quelle contributions sociales, fiscales et environnementales ? Et quelle place de l’humain dans cette nouvelle équation de marché ?

Une conviction se forge : le partage de la valeur est central pour que le développement des plateformes s’inscrive dans la durée. À l’heure de TechForGood et de l’avènement de la loi PACTE, l’enjeu de transformation des entreprises par la responsabilité est majeur.

Interview de Christophe BURTIN, Senior Partner, et Mathieu DAUDE-LAGRAVE, Partner, sponsors du dernier rapport de DigitalFoodLab sur l’état de la FoodTech en Europe.

Publiée le 15 juin 2020 par Matthieu Vincent

Qu’est-ce qui rend la transformation de l’agribusiness et du retail si essentielle ? En quoi les startups peuvent-elles y contribuer ?

La transformation des entreprises traditionnelles, notamment dans les métiers de l’agroalimentaire, est plus importante que jamais. En effet, nous vivons la fin d’un modèle, arrivé au bout de sa corde. Un changement de paradigme est nécessaire à plusieurs niveaux dans leurs organisations.

Les startups présentent un grand avantage : elles savent (et peuvent) prendre des risques. L’une des manières les plus remarquables d’y parvenir est de s’éloigner des procédures internes et des règles habituelles du marché dans lequel elles souhaitent opérer. Les Foodtechs sont donc potentiellement des vecteurs de changement dans les entreprises agroalimentaires.

Ces dernières doivent se pencher sur la manière dont les startups peuvent favoriser le changement de manière positive, à travers des participations, des acquisitions ou des coopérations. L’une des premières étapes consiste donc à concevoir une organisation permettant de nourrir ces structures innovantes, sans les tuer. Les entreprises peuvent leur apporter des informations sur la manière d’industrialiser, de valider des concepts et de mettre des produits sur le marché. Alors que les actifs les plus précieux des startups peuvent être intangibles, car elles apportent de nouvelles façons d’écouter le marché et d’opérer rapidement. À long terme, les entreprises devraient viser de générer (au moins partiellement) ces innovations en interne, à travers l’intrapreneuriat.

Existe-t-il une recette pour réussir une telle transformation ?

Malheureusement, il n’y a pas de « recette magique ». Les entreprises doivent bien analyser le besoin de transformation de leur modèle. Une première étape consiste à comprendre son environnement et les tendances qui le façonnent. C’est toute l’utilité de l’état de lieux de la Foodtech en Europe dont nous sommes les sponsors. Ensuite, les entreprises devraient s’orienter vers une revue stratégique de tous les outils disponibles et identifier ceux qui correspondent à leurs moyens, leur culture et leurs objectifs.

Comment réconcilier performance économique et contribution au commun ?

2020 est une année décisive pour la transformation de nos sociétés en responsabilité. Elle restera marquée dans nos mémoires comme celle qui nous aura imposé à tous, dans tous les secteurs, de changer de regard sur l’économie et d’en penser désormais la soutenabilité. Il n’y a plus d’alternative et il faut se mettre en chemin.

La Revue n° 24 « Responsabilité, du discours à la contribution » s’attache à la question du passage à l’action.

Nous y signons un article sur les 4 piliers qui soutiennent la transformation vers une économie souhaitable, La notion de responsabilité reste clivante. D’un côté, les opposants jouent la carte de l’indifférence et du laisser-faire, quitte à flirter avec un cynisme provocateur. De l’autre, les défenseurs les plus fervents prônent une responsabilité de tous et pour tout, au risque de transformer le marché en véritable tribunal moral. Nous ouvrons une troisième voie, celle de la responsabilité « en action ».

La parole est donnée à des personnalités aux points de vue différents :

  • Christophe Itier, Haut-Commissaire de l’Économie Sociale et Solidaire, au gouvernement jusqu’à l’été 2020,
  • Gaspard Koenig à la pensée libérale,
  • Antoine Sire, porteur de l’engagement de BNP Paribas.

« Au cœur de la question de la responsabilité se loge donc celle de la capacité à déléguer, à faire confiance. Pour que les entreprises soient libérées, encore faut-il que leurs employés soient libres… de réussir comme d’échouer »

Gaspard Koenig, écrivain et philosophe

Stratégie & Culture, les liaisons précieuses

Que nous nous en préoccupions ou non, la culture de notre entreprise influence nos décisions les plus stratégiques et oriente nos actes. Elle est un vecteur fort d’identité et d’unité, souvent un facteur de fierté et d’engagement, de ce fait, source de performance. Mais est-elle alignée avec notre stratégie ?

Lorsqu’il faut négocier des virages critiques – arrivée de nouveaux acteurs, disruption, rapprochement d’entités –, des compartiments de nos héritages culturels peuvent s’avérer trop lourds à porter ou trop limitants. Nombre de situations de fusion l’attestent. A contrario, des entreprises, parmi les plus grandes, montrent qu’il est possible d’agir sur la culture et d’en faire un facteur majeur de différenciation et de compétitivité.

Reste alors à comprendre en pratique les liens à l’œuvre entre stratégie et culture :

  • Qu’est-ce que la culture ? Comment la représenter ? Comment la mesurer ?
  • La culture peut-elle accélérer ou freiner l’exécution de la stratégie ?
  • Quels sont les liens entre culture, engagement et performance ?
  • Peut-on transformer la culture ?

C’est tout l’objet de la publication du cercle de réflexion « Quart d’Heure d’Avance Culture & Stratégie » que d’y répondre.

Ce cercle a réuni pendant plus d’un an (automne 2017 – hiver 2018) une vingtaine de participants, praticiens de l’entreprise, occupant ou ayant occupé des fonctions de direction dans différents secteurs d’activité et organisations. Les échanges ont permis d’identifier les questions prééminentes et les pistes d’action pouvant être mises en place rapidement au sein d’organisations existantes : d’où le quart d’heure d’avance et non l’heure d’avance !

Télécharger la publication

Comment réinventer les modèles économiques de la mode… et renouer avec la croissance ?

Kea co-signe avec l’Institut Français de la Mode une étude incontournable, reconnue par tous les acteurs de la filière.

Issu d’une initiative collective de l’ensemble des fédérations de la mode, sous l’impulsion du DEFI La Mode de France, ce rapport invite à dépasser la sidération provoquée par la crise du Covid et à composer avec la profonde mutation du secteur.

Pour la seconde fois depuis le début du millénaire, l’économie mondiale fait face à une crise d’une gravité inédite comparée à celle de 2008-2009. L’impact du Covid-19, encore difficile à circonscrire à ce stade, sidère déjà par son ampleur. Il peut sembler vain de chercher des références historiques dans les précédentes crises économiques ou sanitaires : la nature du choc est différente en ce qu’elle combine à un degré aigu des problématiques jusqu’ici séparées dont les effets néfastes se renforcent mutuellement.

Le secteur de la mode est, peut-être plus que d’autres, capable de prendre à bras le corps sa réinvention et d’impulser des changements désormais inéluctables. La mode, constamment appelée à renouveler ses manières de faire, ne saurait faire l’économie d’une mutation profonde. Elle y est préparée car la quête de sens, qui conduisait un nombre de plus en plus grand d’observateurs à appeler à une remise à plat du système de la mode, est déjà bien ancrée dans les esprits, particulièrement au sein des jeunes générations.

Les enseignements pour cette industrie qui pèse en France plus de 154 milliards de chiffre d’affaires de l’amont à l’aval :

#1 : Des prérequis pour tous

  • Singularité de la proposition de valeur
  • Clarté de la cible clients
  • Brand content, au-delà du produit
  • Activation d’une stratégie RSE
  • Capacité à s’ouvrir sur l’international
  • Excellence opérationnelleet KPI de suivi
  • Animation de la relation client

#2 : 5 thèmes à explorer

  • Culture et dynamique de transformation
  • Refonte du modèle marchandise
  • Approche par la valeur client
  • RSE au coeur du modèle économique
  • Innovation et technologies dans la chaîne de valeur

#3 : Les caractéristiques transverses des modèles gagnants

  • Frugalité des dépenses marketing
  • Capacité à exploiter la data (clients, produits)
  • Modèles commerciaux hybridés
  • Appréhension des nouvelles dynamiques internationales (glocal vs mega cities)
  • Raison d’être portée par les équipes et claire pour les clients
  • Culture de l’innovation (produits, expérience clients, communications)

#4 : Des facteurs de résilience pour réussir post-Covid

  • Cohérence du modèle opérationnel avec la proposition de valeur
  • Gestion du cash vs gestion de l’EBITDA
  • Capacité à variabiliser les coûts
  • Accès à des sources de financement
  • Structure capitalistique avec un horizon long terme
  • Maturité digitale et e-commerce
  • Personnalité du dirigeant

Kéa est à l’origine d’une grille d’impact positif, un modèle en 9 champs pour éclairer les chemins de responsabilité possibles. Fruit de notre travail de recherche et d’innovation, c’est une boussole qui permet aux dirigeants de choisir leurs combats et de concrétiser la responsabilité et la raison d’être de leur entreprise.

Associé au champ de la « performance globale », ce position paper dresse un état des lieux de la recherche et la réglementation en matière d’extra financier alors que la crise sanitaire et économique a accéléré les réflexions sur la création et le partage de la valeur.

En 2021, l’Union Européenne se dote d’un cadre ambitieux pour les entreprises en matière de durabilité et de sens à donner à leurs activités. Les objectifs traditionnels des entreprises (maximisation du rendement pour l’actionnaire, croissance des parts de marché, financement par endettement ou sur fonds propres) sont désormais complétés par des objectifs émergents qui impliquent une stratégie extra financière : maîtrise des impacts sociaux, sociétaux et environnementaux, développement de produits et services innovants et accessibles, développement d’une finance durable. Les dirigeants doivent penser autrement la performance.

En parallèle, le Green Deal de l’UE (janv 2020) vise à faire de l’Europe le premier continent à atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050. Il couvre trois domaines :

  • Réorienter les flux de capitaux vers des investissements durables
  • Intégrer la durabilité dans la gestion des risques
  • Favoriser la transparence et le long terme dans les activités financières et économiques

Au sommaire :

#1 – La place grandissante de l’extra financier dans la performance globale

#2 – Le rôle clé des actifs immatériels dans la création de valeur

#3 – La question de l’intégration entre financier et non financier

La mesure de la performance des entreprises est aujourd’hui entraînée dans une valse à trois temps, avec trois danseurs : le financier, le stratège et l’opérationnel. Le financier, légitime par son expertise et son pouvoir, est gardien du temple de la comptabilité, des chiffres clefs, et du capitalisme créé il y a deux cents ans. Le stratège, pour sa part, construit des business modèles durables, respectueux de l’environnement et des parties prenantes. L’opérationnel enfin, dépositaire des savoir-faire et activateur des immatériels singuliers de l’entreprise, fait le lien entre les deux. La performance globale devient ainsi plus incarnée, concrète et démocratique.

Pour approfondir le sujet : La Revue Kéa n°19 présentait, dès 2016, de nouveaux référentiels de mesure et s’interrogeait sur « l’entreprise (dé)mesurée » ou comment gagner en initiatives ce que l’on perd en contrôle.

Un article de François Régis de Guenyveau, Responsable R&D du pôle Impact & Transformation responsable

Près de 500 chefs d’entreprises, cadres et entrepreneurs sont attendus à Lyon les 19 et 20 novembre prochains lors des très attendus Entretiens de Valpré. Cette année, le thème retenu est celui du courage. L’occasion d’interroger l’une des quatre vertus cardinales dans un contexte de profonde transformation de l’entreprise.

En 1978, Alexandre Soljénitsyne, Nobel de littérature en exil, est invité par l’université de Harvard pour donner un discours aux futurs diplômés. L’événement fait immédiatement scandale : on s’attendait à ce que le rescapé du goulag, l’écrivain dissident, fustige à nouveau le communisme. Au lieu de cela, il s’en prend au modèle occidental en condamnant fermement l’amollissement des consciences que provoquent la froideur juridique et l’obsession du confort [1]. « Le déclin du courage est peut-être ce qui frappe le plus un regard étranger dans l’Occident d’aujourd’hui », déclare-t-il d’entrée de jeu, à la stupeur de l’auditoire.

Puisque les entretiens de Valpré portent cette année sur le thème du courage, il peut être intéressant de se demander ce qui a changé depuis le discours de Harvard. Où en est le courage aujourd’hui ? A quoi ressemble-t-il ? Quels en sont les facteurs limitants ?

Le sujet de l’entreprise « responsable » a le grand mérite de cristalliser toutes ces questions. Après plus de quarante années d’hégémonie d’un système économique fondé sur l’opulence et le court-termisme, on assiste aujourd’hui à une nouvelle mutation du capitalisme. Raison d’être, social business, comptabilité écologique, performance globale, gouvernance partagée : assurément, il faut une certaine dose de courage pour s’emparer de ces sujets en tant que dirigeant d’entreprise. Car cela implique de changer des habitudes solidement ancrées, de s’exposer à la critique, d’avoir suffisamment de recul pour concevoir les référentiels de la nouvelle économie.

Mais, précisément, le courage se satisfait-il de référentiels ? Se contente-t-il d’épouser les tendances ? S’exprime-t-il dans la simple application des normes ? Car autant les dirigeants qui se lancent dans ces réformes sont encore minoritaires, autant la pression des parties prenantes et le durcissement de la réglementation laissent peu de doute sur l’avènement d’un « capitalisme responsable ».

Or l’actualité donne malheureusement chaque jour un aperçu des dangers qui guettent ce grand mouvement. Il y a bien sûr le social et le greenwashing, les faux-semblants, les amalgames pour redorer son image : Bentley qui prétend avoir une usine « neutre en carbone » [2]. Mais il y a aussi le social et le greenbashing, cette culture de la délation qui fait affront à l’esprit critique : la marque Dove boycottée à cause d’une publicité maladroite. Un salarié de Starbucks licencié sur le champ pour une mauvaise plaisanterie. La moralisation que décrivait Philip Roth dans les universités américaines il y a vingt ans [3] s’étend maintenant partout, y compris en entreprise.

Le vrai courage, dans ces conditions, consiste à corriger les défaillances du passé sans tomber dans les facilités d’un avenir idéologisé qui se drape dans de fausses vertus. Ni statu quo donc, ni chasse aux sorcières. Ni cynisme, ni dogmatisme dévot. C’est en d’autres termes le courage de la complexité : il nous faut des dirigeants capables de reconnaître les dérives du capitalisme de prédation tout en alertant sur les dangers du capitalisme de la restauration.

Dans l’un de ses derniers ouvrages, le philosophe François Jullien constate les limites de nos politiques et les incertitudes majeures que traverse actuellement la planète. Mais plutôt que de sermonner du haut de sa chaire, il invite à détricoter les conformismes idéologiques qui nous enlisent, y compris quand il s’agit de penser l’avenir et le progrès [4]. Effectuer un pas de côté, un « écart de pensée », à l’image des scientifiques et artistes parvenus à faire « dé-coïncider » le monde : voilà le courage auquel nous sommes appelés aujourd’hui.

[1] Alexandre Soljénitsyne, Discours de Harvard 1978 (texte publié par Les Belles Lettres en 2014 sous le titre Le déclin du courage)

[2] Les usines auto neutres en carbone, ça n’existe pas, Challenges, juin 2021

[3] Philip Roth, La tache, Gallimard, 2002

[4] François Jullien, Politique de la décoïncidence, L’Herne, 2020

Un article de Corinne Patarin, Partner & Fondatrice d’Arkos

La transformation est le chantier permanent des dirigeants. Les programmes sont ambitieux et se conçoivent au plus haut niveau de l’entreprise. Les plans de communication, sensibilisation, formation et déploiement sont là pour en assurer la réussite.

Mais voilà, sur le terrain, quand il faut concrètement mettre en œuvre la transformation, quand il faut concrètement changer, ça frotte, c’est plus difficile que prévu dans les plans et les jalons se décalent.

Et pourtant, les dirigeants passent un temps fou à expliquer l’ambition, son bien-fondé, à démontrer par A + B que la transformation proposée est la bonne, est bien celle qu’il faut pour l’entreprise. Mais non, même si l’ambition peut être comprise et acceptée, force est de constater que l’intention ne suffit pas.

Alors quoi ? Même si nous en avons envie, nous ne changeons pas ? En fait, l’intention est louable mais insuffisante : il manque sa traduction concrète pour les équipes ? Comment vont-elles (peuvent-elles ?) traduire cette intention en pratique ? En combien de temps les comportements de chacun vont-ils se transformer ? Comment les équipes vont-elles s’y prendre ? par quoi commencer ? et les autres, vont-ils changer ? Si je fais un premier pas, les autres vont-ils suivre ?

Alors comment passer de l’intention à l’action, concrètement !

Pour passer du travail prescrit au travail réel, changer les pratiques et les comportements, il faut faire preuve d’écoute, de plasticité et de confiance. Il s’agit de confronter l’intention stratégique à la vraie vie. C’est un chemin fait de rencontres, d’échanges, de mises en situation, de mises en confiance, de jeux et de rituels. Et cela, à tous les échelons hiérarchiques de l’entreprise, avec la conviction que chacun, à son niveau, est un sachant intelligent.

Clé numéro 1 : pari sur l’intelligence

Prenons l’exemple d’un changement organisationnel. Sur le papier, une organisation cible est explicitée, avec à la clé de nouveaux flux, fonctions, rôles et tâches. En réalité, quand on va à la rencontre de celles et ceux qui vont la mettre en œuvre, une multitude de cas émergent que personne ne pouvait imaginer a priori et ne pouvait prendre en compte dans le schéma cible, faute de temps et de complexité pour se mettre d’accord avec le comité de direction.

Tout d’abord, pour que la démarche soit éclairante et mobilisatrice, tous les acteurs de l’entreprise doivent être traités en adultes conscients et intelligents, sujets et non objets de la transformation à mener. C’est en faisant faire à tous le chemin qu’a pu suivre le comité de direction : analyse du terrain de jeu de l’entreprise, questions posées par la concurrence, l’environnement… qu’ils peuvent construire leurs propres convictions et commencer à se projeter. C’est en créant l’espace et les conditions pour ce cheminement dialectique de chacun et en faisant le pari de l’intelligence de tous qu’un rassemblement mobilisateur devient possible.

Clé numéro 2 : recueil de la réalité

Pour ce faire, le matériau c’est la réalité. En allant à la rencontre des équipes sur le terrain (rencontre et non pas interview et grille de questionnement), en les écoutant, en utilisant nos sens, des cas concrets de mise en application de la nouvelle organisation vont se dessiner : « ah oui, j’ai compris : quand il se passe cela, il faut faire cela ! ».

Ce recueil va permettre de mettre la nouvelle organisation en situation à partir de cas réels, de la modéliser en miniature, de la jouer… pour la rendre concrète et aider chacun à s’y projeter, en utilisant des moments clés qu’ils vivent concrètement. Pour cela, il faut de la plasticité pour s’approprier la réalité des métiers de chacun et savoir la restituer dans un modèle d’organisation clair, simple… et surtout opérationnel.

L’exercice de la fiche de poste qui est distribué à chacun (dont on ne retient que 10%) est alors inversé : plutôt que d’imposer de nouvelles tâches par des « il faut » et « vous devez », c’est un travail de récolte de situations concrètes, au plus près du terrain, afin de les simuler dans des ateliers d’expérimentation non théoriques. Ces ateliers vont alors provoquer des déclics et questionner les comportements et représentations en place pour pouvoir par la suite les bouger.

Par exemple, la représentation du « client roi » pour l’un n’est pas la même pour un autre : Un hôte de caisse peut avoir en tête l’image d’un client voleur par nature qu’il faut surveiller, débusquer – alors que, dans les faits, cela ne représente que 2% des clients et que la relation avec les 98% restants en est faussée.

Clé numéro 3 : le cascading, la durée et la répétition

Une fois l’organisation modélisée en miniature à travers des cas mis en scène en vidéos, en jeux digitaux, en jeux de plateau, en damiers, en cartes à jouer, etc… les équipes disposent d’outils sur-mesure faisant vivre des expériences transformantes.

C’est le comité de direction qui va vivre le premier l’expérience de ce « kit on the job » et ainsi pouvoir valider que c’est bien cela qu’ils veulent. Ensuite chaque membre du comité de direction va animer l’expérience auprès de ses N-1 et ainsi de suite pour engager toute l’entreprise. Ce faisant, les doutes et les peurs sur la mise en œuvre s’expriment, les convictions aussi. Le changement de représentation et de comportement s’amorce.

Les kits on the job sont animés toutes les semaines avec les équipes, dans LEURS rituels (pour éviter d’empiler des tâches dans des agendas déjà chargés). On mise sur la durée et la répétition : si l’attention est portée ainsi toutes les semaines sur la relation client, la relation avec les clients va changer et de même si mon management incarne cette relation client, je vais avoir tendance, par mimétisme à changer ma relation client. Peu à peu de nouvelles pratiques remplacent les anciennes. Il faut répéter un comportement en situation pendant 20 jours pour l’adopter, 6 à 9 mois pour l’ancrer dans sa pratique. Il faut un an pour cranter réellement de nouveaux comportements dans toute l’entreprise.

Clé numéro 4 : bienveillance et dédramatisation

Nous sommes tous interdépendants : on joue et on résout collectivement. L’approche est bienveillante, ludique, dédramatisante : elle encourage à la prise de risque… d’autant plus que dans le cadre du jeu, dans le cadre de la simulation, on ne risque rien !

Pour résumer en quelques mots :

  • Écouter et comprendre les interrogations des équipes sur le terrain
  • Récolter des situations réelles à confronter à l’intention stratégique du programme de transformation, via des rencontres, du côte à côte, des focus groupes
  • Outiller des ateliers d’expérimentation (déclic et changement de pratique)
  • Animer et faire animer ces ateliers, du comité de direction au chef d’équipe
  • Ancrer par la répétition et le rituel :

C’est ainsi que l’on rend opérationnelle une transformation complexe et concernant un grand nombre d’acteurs.

Selon la manière dont elles sont menées, les transformations techniques et managériales des usines peuvent réduire les marges d’autonomie des opérateurs et techniciens ou au contraire renforcer leur pouvoir d’agir. Ceci pose la question de leur participation à la définition du contenu et des moyens de leur travail, autrement dit au « design » de leur travail. Comment mettre la technologie la plus avancée au service de la compétence et de la créativité des travailleurs ? Comment engager des processus réflexifs qui développent l’intelligence collective ?

Cette note fait suite au premier ouvrage « Organisation et compétences dans l’usine du futur« , paru en 2019, issu des travaux de la Chaire Futurs de l’industrie et du travail dont Kéa est partie prenante. Alors que la première étude investiguait si et comment les technologies dites de l’industrie du futur impactent l’organisation du travail et la gestion des compétences dans les usines, cette seconde étude enrichit les réflexions sur la transformation des usines et des activités de production. Cet ouvrage pose la question du modèle que nous voulons pour les usines et les métiers industriels et donc la question de leur attractivité. Cette question est particulièrement d’actualité dans un contexte d’accélération de la numérisation. Quelle en est la finalité ? Aller un cran plus loin dans la Taylorisation et la définition du travail ou au contraire faire monter en compétences les opérateurs et leur confier plus d’autonomie et de responsabilités ? Opérateur augmenté ou diminué ? In fine, il montre que les entreprises peuvent créer, par l’écoute, l’expérimentation pragmatiste et le soutien managérial, des « bulles de confiance » propres à développer simultanément la qualité du travail et la performance.

Les auteurs, Marie Laure Cahier et François Pellerin, apportent, à la fois, un éclairage théorique sur les dynamiques de transformation industrielles, ce qui a fonctionné et ce qui a moins bien fonctionné, et des illustrations, des réalisations concrètes d’industriels en matière de Design du Travail. Et les exemples inspirants ne manquent pas, dans des entreprises de toutes tailles et dans des activités industrielles très différentes ! Chez Kéa, cela résonne fortement avec notre mission* car il faut une volonté forte des parties prenantes (dirigeants, collaborateurs, syndicats, experts…) pour éviter les écueils des transformations industrielles passées et faire face aux profondes remises en cause des organisations industrielles que cela suppose : implication des opérateurs ; autonomie, responsabilisation et… confiance ; transformation du rôle du management intermédiaire ; inversement de la logique de travail entre opérationnels directs et fonctions support…

Les dirigeants, directeurs industriels et de production, les responsables des transformations numériques, les experts en excellence opérationnelle et en facteurs humains, les managers d’équipe comme les représentants du personnel et les syndicalistes, trouveront dans cet ouvrage de nombreuses idées pour construire des organisations participatives, pluralistes et ouvertes au changement. Parcourir via SlideShare.

* Entreprendre les transformations pour une économie souhaitable, telle est notre raison d’être. En savoir plus

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