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Le local, bientôt une vraie réalité business... et le modèle d'affaires dominant



Pour la sixième année consécutive, LSA a recueilli les projections d’une vingtaine d’experts du retail sur les enjeux de 2021. Ils décrivent un commerce en pleine transformation. Ci-dessous le point de vue de Christophe Burtin.


La Covid 19 a accéléré et révélé le besoin croissant de sens du citoyen consommateur. Au-delà de redéfinir sa raison d’être, le commerçant doit réinventer les raisons d’y venir. Bâtir un magasin à impacts positifs et démontrer la réalité de ses impacts va devenir clé. La transparence sera exigée pour pouvoir continuer à exercer.


La prospective nous éclaire sur les défis à relever. La question est de savoir passer les différents chocs qui vont s’inviter de manière imprévue. Les risques vont devenir incertitudes. Par exemple, notre système est très dépendant d’un pétrole pas cher et les marchandises comme les clients sont sur les routes avec des distances parcourues pas toujours raisonnables. Les équipes du Shift Project nous annoncent d’ici 10 ans un pétrole moins disponible pour l’Europe et des alternatives très peu crédibles en dépit des annonces des pouvoirs publiques. Les matières premières vont manquer. À l’amont, les intrants agricoles, les sols vivants, les métaux, et mêmes les agriculteurs dont le nombre ne cesse de s’éroder.


Les règles qui ont fondées jusque-là les modèles de business de la grande consommation vont s’affaiblir. La massification, la taille, la spécialisation des acteurs, érigées en dogme vont être de moins en moins gagnants.


Le territoire, la zone de vie, vont être les unités dans lesquels il faudra construire de nouveaux écosystèmes en économie circulaire. Ainsi des réseaux locaux d’acteurs interdépendants vont émerger, redistribuant la valeur, et s’éloignant de l’unique discussion annuelle sur le prix du produit. L’hybridation va être la norme. Le magasin va devenir une plateforme phygitale, hub de produits et de services. L’hypermarché, symbole de l’hyperconsommation, va changer de vocation et se reconstruire différemment dans chacune des zones. Il va multiplier les ateliers de production et ainsi produire du local et des recettes “d’ici”. Des fermes très technologiques à capitaux locaux par exemple en captant l’épargne des citoyens vont devenir des unités de productions pas seulement d’aliments mais aussi d’énergie. L’autonomie de chaque entité dans un cadre territorial sera un critère de pérennité : protéique, énergétique, eau, biodiversité. D’ailleurs, beaucoup d’actifs clés vont devenir des biens communs, gérés comme tels. La propriété de ces biens sera nécessairement gérée au niveau de ces territoires. Le terme même de territoire devra d’ailleurs être revisité. Les villes de taille moyenne, avec des dynamiques renforcées, pourraient devenir des nœuds importants de ces nouveaux territoires, en interdépendance avec le monde rural qui les entourent.


Le mot filière, tant mis en avant, mérite d’être renourri. Il faudra conjuguer impacts RSE, accessibilité prix de la ration alimentaire et viabilité économique. Impact positif signifie mesures, partage, arbitrages avec des règles de gouvernance à inventer.

A date, personne n’a le corrigé et plusieurs acteurs tâtonnent, testent, innovent et entreprennent. Ici une micro laiterie, là-bas une ferme verticale sur un entrepôt. Qui va gagner ? Pas ceux qui multiplient les incantations sur des engagements sur “For Good” ou ceux qui pensent pouvoir tel des héros changer le monde tout seul. Les marques mondiales, les grands acteurs centralisés ? Ou les ETI/PME, les indépendants, les coopératives agricoles ?


Il ne s’agit pas de penser mais d’agir et d’inventer de nouvelles méthodes du comment. Inspirons-nous d’autres contrées comme la Corée du Sud ou plus proche l’Espagne. Utilisons les vertus du mode agile. Combinons, coopérons même avec ses concurrents. Le co-développement, l’ouverture aux autres, l’entraide doivent être des principes d’action, et être dans les visions et les plans stratégiques.


Pour cela, les acteurs qui œuvrent au service du système actuel doivent se mobiliser pour inventer de nouvelles méthodes combinant les différents métiers du conseil : stratégie, management, finance, juridique, audit, communication, certification… Des initiatives de la profession se mettent en place : Openagrifood, La Note Globale, Numalim, souvent encore très nationales. Des coalitions d’acteurs sur un territoire devraient s’emparer d’une cause et construire des solutions opérationnelles viables qu’ils pourraient mettre au pot commun. À suivre…


Tribune parue dans LSA en janvier 2021. Retrouver l'intégralité du dossier [Experts 2021] ICI



Christophe Burtin

Partner



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